8 nov. 2014

Prends-moi

Je suis allée voir Vollmond, de Pina Bausch et le Tanztheater Wuppertal ce soir, et, comme prévu, je ne pouvais pas dormir avant d'avoir écrit. Inspirée par certaines des chorégraphies, et par toute la discussion présente au sujet des agressions sexuelles, voici un nouveau poème. (Avec l'histoire de Pandore, mon prochain projet de pièce, toujours présente...)

Prends-moi.  
N'hésite pas.  
Sois ferme.
J'hésiterai à peine       tout juste pour la forme.

Prends-moi.
Fais de moi ce que tu voudras.
Je suis argile          maléable          fébrile    sous tes doigts habiles.
Je me transforme au besoin        selon tes désirs.
Caméléon d'obéissance.

Flexible     et soumise

     Jusqu'à ce que je casse.
     que j'explose.
     que le contenant éclate.

Fragile     asséchée

laissant sortir la peur la laideur l'insomnie les angoisses la perte la douleur.

Tout ce que tu n'as jamais pu voulu voir en moi.

Ma force et ma faiblesse
mes cris de rage et de bonheur
ma vie        mon humanité.

Je ne suis pas parfaite
Je ne suis plus ta déesse     ta statue     ton idole.    Ta poupée.

Je suis une femme.

qui vit qui crie qui jouit.

Une femme qui pleure et qui souffre.
Une femme qui se révolte     et qui porte en elle le monde entier.

Je ne suis pas une sainte
pas Mère Térésa
pas la Vierge Marie.

Je ne panserai plus tes blessures      tant que tu ne panseras pas les miennes.

Mes mains     douces       tendres
se fissurent
à force de vouloir réparer les pots cassés.
J'ai les lèvres gercées  
à force d'embrasser ta fierté.

Je ne joue plus.
Je t'attends           de l'autre côté.

Là où il n'y a plus de divisions
là où nous saurons retrouver
l'unicité originelle
là où nos âmes
se reconnaîtreront
et s'aimeront      comme égales.